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IMGXYZ3052IMGZYXA l’occasion d'une rencontre organisée par le Carnegie Middle East Center, Eric Mottu, du Fonds monétaire international (FMI), a présenté le dernier rapport du FMI sur les perspectives économiques régionales, intitulé « Les bouleversements politiques sont porteurs d’opportunités pour le Moyen-Orient ». Le rapport formule des recommandations sur les politiques à envisager afin de relever les défis économiques du monde arabe à l’aune de l'évolution rapide de la sphère politique. Lahcen Achy du Centre Carnegie et le professeur Simon Neaime de l'Université américaine de Beyrouth (AUB) ont examiné les recommandations du FMI et la façon dont le rapport a répondu à la nouvelle dynamique qui redessine la région.
Menaces actuelles et obstacles à la relance économique
M. Mottu a noté que, bien que le FMI n'ait pas prévu les soulèvements en cours dans la région, ses prescriptions ont examiné les racines économiques du mécontentement actuel.
- Menaces à la reprise économique : la reprise économique n'est pas seulement inégalement répartie entre les économies développées et émergentes, selon M. Mottu, mais elle accuse aussi un déséquilibre entre pays exportateurs et pays importateurs de pétrole au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MOAN). Dans ce dernier cas, la hausse des prix pétroliers et alimentaires a engendré des pressions inflationnistes et des tensions sur les bas salaires. Les taux de croissance modérés ont jusqu'ici été insuffisants pour faire reculer les niveaux de chômage. Suite aux protestations, le tourisme a chuté, ce qui a porté atteinte à la reprise économique en Égypte et en Tunisie, d’après M. Mottu.
- L'équilibre financier, les subventions et les finances : les dépenses publiques ont sensiblement augmenté au cours des dernières années, principalement dans les secteurs sociaux et les subventions. M. Mottu a averti que les subventions ne bénéficient généralement pas aux groupes nécessiteux et doivent être redistribuées à travers de nouveaux mécanismes de répartition. Il a également souligné que le manque de concurrence dans le secteur bancaire rend difficile l'accès au financement pour les petites et moyennes entreprises.
Des solutions économiques novatrices
M. Neaime a exprimé sa déception quant aux conclusions du rapport, affirmant qu'elles ne prennent pas suffisamment en compte le nouveau contexte politique dans la région.
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Des solutions identiques : M. Neaime estime que le rapport du FMI préconise des solutions identiques à celles qui étaient mises en avant avant les soulèvements. Cela constitue selon lui une erreur, car beaucoup de ces solutions ont porté préjudice aux économies de la région MOAN et ont donc contribué à alimenter le ressentiment qui s’exprime actuellement.
- Réponses budgétaires : les réponses budgétaires avancées par le rapport financier pour répondre aux enjeux sociaux urgents face auxquels la région MOAN est confrontée ont été insuffisantes, selon M. Neaime, qui les a décrites comme de "courte vue" puisque traitant uniquement les symptômes au lieu des causes structurelles des problèmes actuels. Il a constaté que, globalement, les pays de la région MOAN ont accompli des progrès sur la voie de l'équilibre budgétaire et d’une faible inflation, deux préoccupations anciennes du FMI. M. Neaime a suggéré qu’il fallait réorienter l'immense capacité budgétaire des pays exportateurs de pétrole afin de promouvoir une redistribution plus inclusive à la fois dans la région et au sein des pays exportateurs de pétrole eux-mêmes.
- Un nouveau modèle de développement : selon M. Neaime, la région MOAN est à un tournant crucial dans son histoire. Elle doit s'éloigner de « l’agenda stéréotypé de la norme néolibérale », qu’il accuse d’être le catalyseur des troubles actuels, et progresser vers la mise en œuvre d'une nouvelle approche plus « holistique » qui intégrerait toutes les dimensions sociales.
Une conception inclusive des politiques publiques
M. Achy a affirmé que seule une approche politique inclusive à la production d'une stratégie économique globale à moyen terme serait capable d’avoir un impact positif sur les pays de la région MOAN.
- Le concept d’une « croissance inclusive » : le nouveau rapport du FMI a abordé, pour la première fois, le concept de « croissance inclusive », qui souligne que les niveaux de croissance ne sont pas le but ultime mais que la redistribution de la croissance économique est également essentielle. M. Achy s’est félicité de cet ajout et il a appelé à déterminer davantage de moyens pour évaluer l’ « inclusivité » de la croissance, étant donné que les indicateurs actuels ne donnent souvent aucune information sur la redistribution.
- L'inadéquation des solutions : pour M. Achy, le rapport préconise trois objectifs principaux: la création d'emplois, la réaffectation des subventions et la promotion de l'accès au financement pour les petites et moyennes entreprises. Ces objectifs, a-t-il précisé, ne sont pas nouveaux. L'absence d’une vision de développement à long terme dans la région MOAN, la prévalence de la corruption et la mauvaise gouvernance ont nui à l'emploi de manière plus importante que la croissance démographique, le manque d'éducation et de formation liées aux besoins de l'emploi, et la rigidité du marché du travail.
- Le rôle crucial des institutions : M. Achy a souligné l'importance des institutions dans la mise en œuvre d'un modèle de développement plus inclusif. L’« inclusivité » n'est pas seulement l'inclusivité des résultats mais aussi l'inclusivité au moment de la conception des politiques, a-t-il déclaré, suggérant qu'une grande variété de groupes et d'opinions devraient être consultée. Et de conclure : « Tout comme les protestations domestiques conduisent à la transformation politique, un mouvement domestique peut conduire à la transformation économique ».